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Les Cadic, deux cousins au service de la Bretagne

Entre les années 1870 et les années 1930, deux cousins, Jean-Mathurin et François Cadic, hommes de religion, ont beaucoup œuvré à quelques décennies d’intervalles, pour la diffusion et la valorisation de la culture bretonne, l’un dans le Morbihan, l’autre à Paris.

Jean-Mathurin Cadic, prêtre collecteur

Né à Kerfourn en 1843, Jean-Mathurin Cadic est tout d’abord scolarisé à Pontivy. Il entre ensuite au petit séminaire de Sainte-Anne d’Auray puis au séminaire de Vannes, où il est condisciple de Joseph Loth, futur linguiste, spécialiste des langues celtiques. Ordonné prêtre en 1869, il est nommé vicaire à Baden en 1870, à Plouharnel en 1874 puis à Auray en 1876. Il est ensuite nommé recteur de Bieuzy-les-Eaux en 1892, où il reste jusqu’à sa mort en 1917.
Amoureux de la langue bretonne, Jean-Mathurin Cadic compose de nombreux cantiques en l’honneur des saints patrons de plusieurs paroisses. Lors de son vicariat à Auray, il publie également dans Le Courrier des campagnes un feuilleton historique sur la Chouannerie. Il est aussi collecteur de chansons bretonnes, privilégiant les gwerzioù, récits chantés historiques, épiques et tragiques. Il en publie plusieurs, sous le pseudonyme de Yann Kerhlen, dans différentes revues savantes la Revue Morbihannaise, la Revue de Bretagne de Vendée et d’Anjou et Dihunamb. Son talent littéraire se révèle en 1897 par la publication de En Est (la moisson), un très long poème décrivant les moissons en terre morbihannaise.

François Cadic, au secours des Bretons de Paris

La même année, son cousin, François Cadic fonde la Paroisse bretonne de Paris. Né en 1864 à Noyal-Pontivy, il a suivi la même scolarité que Jean-Mathurin. Et comme lui, il collecte les chants anciens. Installé à la Capitale, la détresse physique et morale des nombreux Bretons émigrés sur Paris l’émeut. Et, avec son œuvre la Paroisse bretonne de Paris, François Cadic cherche à aider les ouvriers et domestiques bretons à trouver un emploi fiable. 600 personnes sont ainsi placées la première année, 1 200 la seconde.
La Paroisse bretonne développe également de multiples services : asile pour les nouveaux arrivants, réseau de logeuses, vêtements pour les plus démunis, réduction auprès des commerçants, ventes de charité, bibliothèque populaire, système d’épargne volontaire permettant de faire face à la maladie ou au chômage, assistance médicale et juridique à prix réduit, voire gratuite pour les plus pauvres… L’œuvre dirigée par François Cadic propose aussi de nombreuses conférences traitant de problèmes de santé, d’éducation, de société mais aussi de culture bretonne (histoire, contes, légendes, chansons). Ces dernières ont pour but d’éviter le déracinement et sont aussi un moyen d’apostolat. Elles sont suivies par plusieurs centaines de personnes et se terminent très souvent par de la danse bretonne. Des concerts de musique bretonne (bombarde et biniou mais aussi chant et piano) sont aussi organisés afin de venir en aide aux plus démunis.
En avril 1899 paraît le premier bulletin de liaison destinée à diffuser cette culture populaire bretonne auprès des Bretons de Paris, mais aussi de Bretagne. Il est publié pendant trente ans. Le succès de la Paroisse bretonne de Paris est fulgurant : 900 adhérents en 1899, 2 000 en 1900, 7 000 en 1903, 10 000 en 1905, 15 000 en 1907. Le réseau breton est si développé que 25 000 personnes le sollicitent en 1910 pour trouver un emploi. D’autres paroisses bretonnes voient le jour dans d’autres villes : en banlieue parisienne mais aussi à Chartres et au Havre.

Les carnets de collecte en héritage

En 1917, à la mort de son cousin Jean-Mathurin, François Cadic, hérite de ses carnets de collecte. Il en publie plusieurs extraits dans sa revue La Paroisse Bretonne de Paris. Au sortir de la guerre, l’œuvre sociale de François Cadic est en perte de vitesse. Son fondateur est de plus très malade. Rentré en Bretagne dix jours avant sa mort, il décède à Saint-Jean Brévelay en 1929, à l’âge de 65 ans, et est enterré dans sa paroisse natale. La Paroisse bretonne ferme alors ses bureaux, privée de son mentor.
Les Archives du Morbihan possèdent les exemplaires de la dernière décennie de parution de la revue La Paroisse bretonne de Paris sous la cote EB 13. Sont conservées également dans les collections imprimées de la bibliothèque les revues savantes la Revue Morbihannaise (cote IB 92, années 1891-1914), la Revue de Bretagne de Vendée et d’Anjou (cote IB 71, années 1857-1914) et Dihunamb (cote IB 44, années 1905-1944) tout comme une partie de la production littéraire des deux auteurs. Par ailleurs, Le courrier des campagnes dans lequel Jean-Mathurin Cadic publia un feuilleton historique sur la Chouannerie est entièrement numérisé et consultable en ligne. Enfin, les Archives du Morbihan ont publié en partenariat avec Dastum Bro Ereg en 2007 un ouvrage rassemblant le collectage de chansons par Jean-Mathurin Cadic et publiées dans différentes revues savantes.

Sources utilisées :

  • EB 583. - La paroisse bretonne de Paris, l’œuvre de François Cadic par Fanch Postic dans Ar men, n° 103, mai 1999, pp. 12-19.
  • HB 12230. – Augustin Guillevic et Jean-Mathurin Cadic : chants et airs traditionnels du pays vannetais coédité par Dastum Bro Ereg et les Archives départementales, 2007.
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