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Jean-Pierre Calloc'h

2017 marque le centenaire de la mort de Jean-Pierre Calloc’h tué au champ d’honneur. Il était un ardent défenseur de la culture bretonne.

Une vie marquée par le chagrin

Jean-Pierre Calloc’h naît à Groix le 21 juillet 1888. Fils d’un marin pêcheur dont il hérite la force physique (1,84 mètres pour 75 kilos) et d’une mère cultivatrice, il est le deuxième d’une fratrie de quatre enfants : deux garçons, deux filles.
De sa vie, marquée par plusieurs événements tragiques, il écrit dans la Guerze de la mort « Les larmes sont mon souper, mon sommeil et mon déjeuner ». Jean-Pierre Calloc’h perd son père en octobre 1902 puis sa sœur aînée en 1909, la cadette en 1914, emportées toutes deux par des crises d’épilepsie qui auront raison également de son jeune frère en 1927. Cette prédisposition familiale pèse lourdement dans la vie de Calloc’h. Devenu soutien de famille à quatorze ans, il est très proche de sa mère qu’il nomme dans chacune de ses correspondances «Mam Karet» soit mère chérie.

Intelligence et foi profonde

D’intelligence précoce, il est scolarisé à 2 ans et demi chez les sœurs du Saint-Esprit puis à 6 ans, chez les frères des Écoles chrétiennes. À 10 ans, il est un des élèves particuliers de l’un des vicaires de l’île, l’abbé Leroux qui décèle en lui une vive intelligence couplée à une très grande piété qui le prédestine à une carrière ecclésiastique. En 1899, âgé de 11 ans, il quitte l’île afin de poursuivre ses études au petit séminaire de Sainte-Anne d’Auray et devient bachelier ès lettres en 1905. L’année de son baccalauréat marque le début de son parcours littéraire en collaborant à la revue Dihunamb sous le pseudonyme de Bleimor qui signifie loup de mer en breton. Il s’essaie ainsi à l’écriture de poèmes et de pièces de théâtre. Il poursuit sa formation religieuse au grand séminaire à Vannes tout en continuant la lecture et l’étude du breton. Cependant, deux ans plus tard, lors d’une visite à la chapelle Sainte-Barbe du Faouët, il est victime d’un violent malaise qu’il interprète comme les prémices de la maladie familiale. Jean-Pierre Calloc’h doit alors renoncer à la prêtrise.

 

Viscéralement attaché à la Bretagne

Contraint de changer de voie et mu par la nécessité impérieuse de gagner sa vie, le Groisillon se tourne vers des emplois modestes autour de l’enseignement comme des postes de répétiteur à Reims ou à Paris. Son service militaire le ramène à sa chère Bretagne. Il réalise sa formation militaire comme simple soldat de 2e classe à Vitré de 1909 à 1911 où il donne également des cours en breton à des soldats illettrés bretonnants. À la fin de son service, il occupe à nouveau des postes d’enseignement. En parallèle, il collabore à la revue Brittia, l’éphémère revue dirigée par Yves Le Diderder, collecteur des traditions populaires bretonnes.
Lorsque le premier conflit mondial éclate, il tarde à Jean-Pierre Calloc’h d’aller en découdre. Incorporé au 1er février 1915 dans l’infanterie, il part pour le front, nommé aspirant puis sous-lieutenant. « Aux frontières de l’est, je suis le rocher breton » écrit-il dans Quart de nuit aux tranchées. Les longues veillées dans les tranchées lui inspirent de nombreux poèmes dont la prière du guetteur, texte envoyé à l’écrivain René Bazin qui, bouleversé, le publie le 7 janvier 1917 dans l’Écho de Paris.
Trois mois plus tard, le sous-lieutenant Calloc’h est tué d’un éclat d’obus le 10 avril 1917 à Urvillers près de Saint-Quentin dans l’Aisne. Il a alors 29 ans. La légende est en marche, Calloc’h devient avec son recueil de poèmes posthume Ar en Deulin, l’un des grands poètes de langue bretonne. Naturellement, depuis ses débuts, ses textes ont gagné en maturité et en force linguistique. Ils révèlent une connaissance profonde du breton et de sa lexicographie. Les thèmes principaux en sont la foi, la Bretagne, surtout son île qui l’a vu naître et grandir, la terre des ancêtres, évoqués sur le ton de la prière, du conte révélé à la veillée.

Des archives uniques

Les Archives départementales du Morbihan conservent de nombreux documents relatifs à Jean-Pierre Calloc’h. En effet, en 1963, entrent sous la cote 14 J, les archives d’Yves Le Diberder avec lequel Calloc’h a collaboré et entretenu des relations étroites. Il faut signaler ainsi parmi les documents remarquables les lettres autographes – une quarantaine – du poète groisillon adressées à sa mère. Dans une partie du fonds, se nichent également des manuscrits du poète et publiés ensuite dans la revue Brittia, mais aussi les manuscrits du recueil de poèmes Ar En Deulin dont Le Diberder a assuré une nouvelle publication en 1936. Il est à noter qu’Yves Le Diberder a réalisé de nombreux portraits photographiques de son ami et collaborateur, conservés dans ce fonds, qui illustrent encore aujourd’hui les diverses publications relatives à Bleimor.
Les Archives du Morbihan conservent également au sein de leurs collections imprimées les publications de Jean-Pierre Calloc’h. La revue Brittia est ainsi numérisée et consultable en ligne sur archives.morbihan.fr tandis que les exemplaires de la revue Dihunamb (1905-1944) sont consultables sous la cote IB 44.

Sources consultées :

  • 20 H dépôt 2 /1633. – fonds de Lesvellec, dossier médical de Joseph Calloc’h [le frère de Jean-Pierre].
  • R 2055. - Registre matricule militaire, arrondissement de Lorient, année 1908, matricule 1627 : état signalétique de services de Jean-Pierre Calloc’h [en ligne sur www.archives morbihan.fr].
  • 14 J. - fonds privé Yves le Diberder.
  • HB 812. - Palaux Léon, un barde breton. Jean-Pierre Calloc’h-Bleimor, sa vie et ses œuvres inédites, 1888-1917, Quimper, 1926.
  • KB 5532. - Le Bras, Gwenael, Yann-Ber Kalloc’h, préface de Jorj Belz, Lorient, 1988.
  • HB 8343. - Favereau Francis, Anthologie de la littérature bretonne au XXe siècle, Morlaix, éditions Skol Vreizh, 2001.
  • HB 1044. – J. P. Kalloh Bleimor, Ar en deulin... Guerzenneu brehonek. À genoux, poèmes bretons(poèmes en breton avec traduction française), préface de J. Loth, Lorient, 1935.
  • HB 2657. - Yann Ber Calloc'h, Jean Pierre Calloc’h, Ar en Deulin / À Genoux, Rennes, édition Kendalc'h, 1963.
  • Heulin Antony, la mort dans l´œuvre de Yann-Ber Kalloc´h et Loeiz Herrieu, thèse universitaire, Rennes, 2014 [consultable sur https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01127282/ ]
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